Les Livres Virtuels
Index Les enfants de la PRINCESS AUGUSTA




REVENONS AU BAN DE LA ROCHE




LE FANTOME AU GRAND CHAPEAU

       Un fantôme à grand chapeau
       (reconstitution raisonnablement vraisemblable compte-tenu des données généalogiques et ethnologiques disponibles).

       Nous sommes à Rothau, Ban de la Roche, en 1714 ou un peu avant.

       Rothau voit arriver un personnage d’importance: il s’agit de Jean-Georges WIEDEMANN (21), le nouveau forgeron que le pasteur RÜGER a fait venir du Val de Munster. Cette petite région était à peu près indépendante avant le rattachement à la France. C’est pourquoi elle regrette le passé; sa population manifeste son sentiment anti-français par les moyens à sa portée, et ils sont vestimentaires.

       En effet, comme tout le monde le sait: la France c’est Paris, et Paris, c’est la mode. En conséquence, à l’époque qui nous intéresse, les habitants du Val de Munster considèrent comme un devoir patriotique de refuser de suivre la mode. Etre en retard sur la mode de moins de cent ans, c’est quasiment de la haute trahison. Les gens de Munster se reconnaissent donc à leur habillement datant du siècle précédent, et au grand chapeau dont ils sont affublés.

       Les descendants de la famille WIEDEMANN, dont je suis, doivent donc visualiser ainsi l’arrivée à Rothau de leur ancêtre fondateur Jean-Georges: une sorte de Rip van Winkle paraissant s’être échappé d’un autre siècle par quelque couloir du temps.

       Nul doute que ce fantôme à grand chapeau n’est pas passé inaperçu.

       Cela dit, si les habitants de Rothau, jugeant sur la mine, ont pris ce drôle de Hans (22) pour une andouille, ils ont eu grand tort. C’est le fils du prévôt de Soultzeren, et le descendant d’un pasteur de première importance.

       Jean-Georges n’est pas simplement forgeron. Il est maître-maréchal. Nuance. Il a été reçu comme leur pair par les maîtres de sa guilde. Avant cela, il a circulé de ville en ville pour parfaire son art. Il a ainsi appris beaucoup de choses, et pas seulement sur l’art de la forge... Il en dit ce qu’il veut à qui il veut...

       Il est à la tête d’une lignée dans laquelle on ne se contente pas de ferrer les chevaux et fabriquer des clés. Les WIEDEMANN fabriquent bientôt des pièces autrement importantes pour l’économie locale. Et le Ban de la Roche en a bien besoin... Certes, Jean Georges n’a pas le pouvoir de remettre en route les mines et leurs hauts fourneaux, mais avec un maître maréchal, on aura au moins des moulins et des scieries en état de marche... C’est déjà ça.

       Jean Georges est aussi très impliqué dans la vie de l’Eglise et il y exerce bientôt des responsabilités, semble-t-il financières («receveur des biens de l’Eglise»)

       Si la vie professionnelle de Jean-Georges est satisfaisante, sa vie familiale est triste: il a de nombreux enfants, mais deux seulement survivent (Jean-Michel et Anne-Marie); et leur père a tout juste le temps de les croiser sur cette planète avant de mourir lui-même en 1734...


page suivante