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Index Les Voyageurs de la PRINCESS AUGUSTA



LA GUERRE DE TRENTE ANS



       La Guerre de Trente Ans (1618-1648) s'analyse sous plusieurs angles, à savoir :

       Sous l'angle de la "Grande politique"
       ou sous l’ange local

       La guerre vue sous l’angle de la « grande politique »

       Sous l'angle de la "grande politique", elle s'analyse :
  1. comme une guerre de religions opposant protestants et catholiques
  2. comme une guerre de toute l'Europe contre la volonté d'hégémonie de l'Empire « autrichien » (devise : A E I O U = Austriae Est Imperare Orbi Universo = il appartient à l'Autriche de commander à tout l'univers; contre une telle prétention, c'est tout l'univers qui se rebiffe, enfin je veux dire tout l'univers qui compte à l'époque, c'est à dire toute l'Europe)
       La guerre se divise dans le temps en quatre phases, nommées chacune d'après la principale force d'opposition à l'Empire :
  1. la phase allemande
  2. la phase danoise
  3. la phase suédoise
  4. la phase française
       Mais peut-être est-il bon, avant de s’interesser à chacune de ces phases, de dire deux mots de ce qu’est « L’Empereur », car le lecteur moderne l’a peut-être oublié.


L’HERITIER DE L’EMPIRE ROMAIN

       Depuis la fin de l’Antiquité, l’Empire Romain n’en finit pas de mourir.

       Théoriquement héritier des Empereurs de Rome, et à ce titre supérieur à tous les pouvoirs locaux y compris ceux des Rois, l’Empereur n’a jamais eu en réalité les moyens d’une telle ambition. En particulier, le Roi de France a fait savoir une fois pour toutes qu’il est « Empereur en son Royaume », et, depuis le Moyen-Age, l’Empereur a compris qu’il était vain d’essayer d’aller contre cette politique (la bataille de Bouvines, 12 juillet 1214, l’ayant quelque peu aidé à comprendre). En Italie, le pouvoir impérial se heurte à celui du Pape, qui lui aussi a des ambitions de puissance supra-nationale (Guerre des Guelfes et des Gibelins). A l’époque qui nous interesse, ce qui reste de l’Empire se situe de fait dans ce qui actuellement l’Allemagne et l’Europe centrale, si bien que l’on parle de Saint Empire Romain Germanique.

       Les différentes parties de l’Europe échappent l’une après l’autre à l’orbite impériale, celles qui sont le plus éloignées géographiquement échappant le plus tôt (ce n’est pas un hasard si l’Europe de l’Ouest fut très tôt composée de grands royaumes comme la France et l’Angleterre, cependant que l’Europe centrale ne réussissait pas à sortir de l’émiettement).

       Pour les régions d’Europe centrale, dont Le Ban de la Roche et le Salm font partie au sens large, les villages de nos ancêtres nous donnent une bonne idée de ce que pouvait être l’émiettement du pouvoir politique puisque, sur territoire de la dimension d’un grand ranch américain, nous avons: Le Ban de la Roche (« colonie » suédoise gouvernée par des descendants de la famille royale de Suède, la famille de Veldenz-Deux-Ponts); le Val de Villé; la Principauté de Salm; le Comté de Salm, à ne pas confondre avec la Principauté; des terres catholiques appartenant à l’Evêque de Strasbourg (Schirmeck, Natzwiller, et villages satellites); à ne pas confondre avec les terres protestantes dépendant du « Gericht » ( = à la fois Tribunal et Conseil municipal) du même Strasbourg (Barr et villages satellites)

       La tendance lourde aurait voulu que l’Empereur devienne une sorte de Roi d’Allemagne et/ou d’Autriche-Hongrie, ce qui d’ailleurs finira par être le cas au 19ème siècle. Mais, à l’époque qui nous interesse, nous n’en sommes pas encore là. La pente de l’histoire (Empereur = Roi d’Allemagne) est contrariée par la volonté de tous les acteurs concernés, à savoir:
  1. les « princes allemands » ( = les divers pouvoirs germanophones, Princes ou autres) n’ont aucune envie de devenir les sujets d’un Super-Roi; ils se veulent indépendants, l’Empereur n’étant, pour eux, qu’une sorte de suzerain du Moyen-Age auquel on ne devrait, dans l’idéal (idéal qui n’a jamais été réalisé à aucune époque) que des obligations protocolaires (la cérémonie de l’hommage), ainsi qu’une « loyauté » que les poêtes savent chanter, mais que les diplomates ne savent faire durer, à supposer qu’ils l’essaient, qu’aussi longtemps que les intérêts convergent


  2. l’Empereur, de son côté, trouve l’Europe centrale un peu petite pour ses ambitions; il se voudrait le chef de toute la chrétienté, et même, quand les circonstances semblent le permettre, le maître du monde ( « A E I O U »); une telle possibilité parut s’ouvrir sous le règne de Charles Quint, qui avait réussi à gouverner, de façon à peu près effective, non seulement l’Europe centrale, mais aussi les Pays Bas et l’Espagne avec ses colonies d’Amérique, se créant ainsi un Empire « si vaste que jamais le soleil ne s’y couche ». Si bien que ses idées de grandeur ne connaissaint plus de limites.
       L’expression « Maison d’Autriche » pour désigner les Empereurs Habsbourg n’est pas une expression qu’ils utilisaient pour eux-mêmes; il s’agit d’une expression polémique utilisée par la diplomatie française au temps de Louis XIV; utiliser cette expression, cela revient à dire: « Occupez vous de gouverner l’Autriche, et laissez le reste du monde tranquille ». Le titre « Empereur d’Autriche » ne fut utilisé officiellement dans les relations internationales qu’à la suite des victoires de Napoléon. La précision « d’Autriche » est en réalité réductrice et comprise comme telle. Napoléon avait pour la part, comme titre officiel, « Empereur des Français », mais, à chaque fois qu’il en avait l’occasion, il « oubliait » de faire mention des « Français »; il aurait voulu, lui aussi, devenir « l’Empereur » tout court, c’est à dire, au moins protocolairement et potentiellement, le maître temporel de toute l’Europe.

       Ce n’est donc qu’au XIXème siècle, dit « siècle des nationalités », que l’Empire Romain finit vraiment de mourir, laissant la place aux Etats-Nations modernes.




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