Les implantations de
Pigeon Hill et de
Pleasant Valley (devenue
ensuite
Buchanan Valley) sont l’une et l’autre à proximité de la rivière Canewago. Elles sont proches l’une de l’autre
mais il convient cependant de les distinguer.
Pigeon Hill:
L’implantation se situait sur l’une des branches du «
Beaver Creek »,
au nord de
Pigeon Hill, dans ce qui est devenu ensuite les
Comté d’York et d’Adam (à l’époque, la nouvelle
implantation ne se distinguait pas du Comté de Lancastre et n’avait à vrai dire pas de statut administratif bien précis;
en effet, c’est à la suite d’implantations de colons que l’on découpait de nouveaux Comtés, et non avant). La tradition
locale garde la mémoire d’une «
French colony ».
Elles se compose semble-t-il de:
Pierre Delon,
Jean François
Chrétien,
Nicolas Strasbach et
Nicolas Ory. Ces familles restent catholiques, sauf peut-être Nicolas
Ory, dont le cas est douteux; il semble avoir amené là par l’amour (il vient d’épouser, ou il va épouser, Anne,
fille de Nicolas Strasbach). On note l’absence de François Ory, qui n’a semble-t-il aucune envie de rejoindre une
implantation catholique et préfère rester à Cocalico.
Pigeon Hill semble être leur première implantation durable.
Malgré les difficultés de pratique de la religion catholique, il y a
dans la région quelques missionnaires jésuites qui encadrent la communauté de façon plus ou moins clandestine au
début. D’où une tendance au regroupement des catholiques. Si bien qu’au bout d’un moment, on parle du «
Irwin clan »,
expression qui désigne un ensemble de personnes irlandaises, écossaises ou supposées telles. Le
Irwin Clan, comme son
nom ne l’indique pas, comprend aussi les familles salmoises venues sur la Princess Augusta.
Pleasant Valley (future Buchanan Valley)
Ce n’est pas loin de Pigeon Hill. Il s’agit d’une petite vallée
de quelques kilomètres carrés seulement, bien encadrée par des montagnes, aux sources du Canewago. C’est un petit
coin de paradis, boisé, fertile, riche en faune sauvage. Les catholiques ont décidé de s’y installer loin des regards.
Le tout premier à s’y installer fut James Bleakley en 1734.
Tout de suite après, vient le « Irwin Clan » en provenance de Pigeon Hill,
à savoir: Casper Hiller,
Nicolas Strasbach, «
John Dellone », «
Andrew Noel », Donald Mc Clellan,
William Cobb, James Kern, «
Michael Dellon », Jacob Sterner, William Milligan, James Jameson (Jemison), Robert Buck,
Christopher Warren, Jacob Simmons.
On remarque l’absence de Nicolas Ory, que l’amour a entraîné jusqu’à Pigeon Hill, mais pas jusqu’à
Pleasant Valley. Lorsqu’il quitte le Comté d’York, à peu près 1750, il déménage pour le Maryland
(Frédéric County), puis pour la Louisiane (colonie d’Alsaciens et de Palatins dite « German coast » sur le
Mississipi à quelques kilomètres de la Nouvelle Orléans)
On remarque aussi que cette énumération fait masse de tous les membres
du
Irwin Clan, quelle que soit leur origine. Nos Salmois sont mélangés à des anglophones, parmi lesquels
des Jameson, alias Jemison, une famille qui sera très éprouvée.
MASSACRE DE LA FAMILLE JEMISON ET ENLEVEMENT DE MARY JEMISON
Le lecteur se souvient qu’en 1755, lors de la French and Indian
War, les Français ont remporté une importante victoire autour de Fort Necessity et de Fort Duquesne.
Bataille à laquelle Jean-François ORY participa côté anglais.
En 1755, donc, à la suite de cette victoire, le parti franco-indien se
sent pousser des ailes. C’est dans ce contexte qu’intervient l’attaque de la ferme Jemison. On en lira un compte-rendu
complet dans l’ouvrage virtuel de Richard Dillon(58)
Il suffira de dire ce qui suit:
Notre vallée, qui est pro-anglaise, ne parle que des atrocités réelles
et/ou supposées des Indiens et des Français, et se dote d’une « Block House », un petit fort situé près de l’actuel
village de Arendsville. Il s’agit de pouvoir s’y réfugier comme on le faisait au Moyen Age dans le château-fort.
En fait, on s’y réfugie en général trop tard. En cas de vraie surprise, comme dans l’affaire qui va suivre, le fort ne sert à rien.
Ouvrant la porte de sa ferme, Mary Jemison, 12 ou 13 ans, trouve le
cadavre d’un voisin et de son cheval, qui viennent d’être tués par les Indiens. Quelques secondes après, la ferme
est envahie par six Indiens et quatre Français. Toute la maisonnées Jemison est faite prisonnière, à l’exception des
deux frères ainés, qui se trouvaient dans la grange lors de l’assaut et ont pu s’y cacher. Sont également
capturés Mme Buck et ses enfants, qui étaient là pour chercher du réconfort, car l’époux de Mme Buck était à
la guerre; peut-être connaissait-il Jean-François Ory, qui sait? Ils se battent du même côté.
Commence une course épuisante, sous les coups, sans nourriture ni
boisson suffisante. Il semblerait que les ravisseurs soient loin de leur base et en difficulté pour la rejoindre dans
des délais convenables avec leur groupe de prisonniers qui n’ont pas tous la robustesse de jeunes guerriers.
Le meurtre de la plupart des membres du groupe paraît lié à cette
difficulté de « gérer » tous ces prisonniers. Les meurtres ne semblent pas prémédités. Ils ont lieu hors de la vue des
deux enfants épargnés et ne semblent pas accompagnés d’actes de barbarie.
Tous les prisonniers sont tués et scalpés à l’exception de Mary Jemison
et d’un enfant de la famille Buck.
Mary Jemison fera sa vie dans cette tribu Indienne, qui l’adopte et
la traite bien. Elle est la matriarche d’un imporant clan Indien qui porte son nom. Elle garde une forte nostalgie de son
enfance heureuse dans la Pleasant Valley, mais elle ne saisit pas les occasions qui s’offrent à elle de retourner vivre
parmi les Blancs. Elle dit craindre que ses enfants, voire elle-même, ne soient méprisés. Elle a bonne opinion des Indiens,
qu’elle décrit comme honnêtes, pudiques, et heureux de vivre avec peu de choses.
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DES CHATS SORCIERS?
Pleasant Valley se caractérise par une importante vie sauvage: ours, daims, loups, « racoons », renards... et chats
sauvages, ces derniers étant mal vus de la population.
Pour les chasser, Casper Fink a une idée: il allume des feux dans les
endroits où les chats sauvages vivent le plus nombreux.
Depuis cela, les chats sauvages ont quitté la vallée. On raconte
qu’avant de partir, il ont poussé un hurlement qui faisait peur à entendre...
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PERMANENCE DES TRADITIONS FORESTIERES
Pendant des années, la messe est dite dans la ferme de John Irwing, puis
la communauté peut faire construire en 1816 l’église Saint Ignace, ainsi nommée en raison de la part prépondérante prise
par les Jésuite dans l’encadrement religieux des catholiques de la région.
Des améliorations sont faites vers 1850: réparations diverses, installation
d’un poêle et de sièges. Pour les financer, des Delon et des Strasbach coupent du bois et vendent le charbon de bois qu’ils
en ont tiré.
Ils n’ont donc pas tout oublié des traditions forestières du pays de Salm...
Ils les ont conservées plus de cent ans: de 1736 à 1850 au moins.
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